Scandale des plis électoraux - Quand l‘Etat redécouvre le service public

Le ministre de l’intérieur s’est exprimé hier, mardi 23 juin, devant une commission sénatoriale sur les carences dans la distribution du matériel électoral. Il a renvoyé dos à dos la société Adrexo et La Poste qui n’ont pas su ou pu distribuer environ 9% des plis, selon leurs estimations.

Il a aussi mis en cause les règles européennes qui impliquaient qu’un tel marché devait être ouvert à la concurrence et qu’Adrexo possédait seule une licence de l’ARCEP pour se présenter face à La Poste. Soit, mais cela impliquait-t-il automatiquement que la moitié du marché (évalué à 200 millions d’€) lui soit allouée ?

Le préambule de tout contrat repose sur l’évaluation de la capacité d’un fournisseur, ce que les services de M.Darmanin semblent avoir ignoré. De l’aveu même des représentants du personnel d’Adrexo il faudrait ajouter 40 000 personnes aux 18 000 que compte la boite pour faire le job.
D ‘autre part si La Poste n’a pas non plus rempli son rôle pour que ce scrutin certes complexe mais connu de longue date se déroule normalement, c’est bien qu’elle est actuellement dans une stratégie de terre brulée pour tout ce qui concerne le courrier : suppressions d’emplois (-13 000 en 2020), réorganisations massives, organisations du travail qui ne laissent aucun répit, conditions de travail déplorables avec des “ilots” dans des locaux insalubres type box de garage. Les dirigeants de La Poste ont saisi la « formidable opportunité de la pandémie » selon leurs propres termes pour réduire la voilure du service public postal.

Le fiasco de la distribution des plis électoraux du premier tour peut parfaitement se reproduire d’ici dimanche. La Poste reprend une partie du travail d’Adrexo et se tourne désormais vers les factrices et facteurs pour assumer la tâche : retours le samedi, heures supplémentaires, et comme d’habitude des compensation au ras des pâquerettes.

Une démarche qui ne manque pas de sel quand les postiers ont fait ceinture sur la prime Covid recommandée par le 1er ministre en mars, ou quand ils n’ont pas vu la couleur d’une prime d’intéressement en 2020 alors qu’ils ont assuré leurs missions au réseau, à la Banque Postale et sur le terrain tous les jours.

Pour Sud PTT cette charge de travail supplémentaire doit être compensée à hauteur de deux jours de repos compensateurs par tour de scrutin. Soit quatre jours pour les salariés de La poste et d’Adrexo qui vont distribuer tous les scrutins et deux jours pour les postier-e-s récupérant les plis d’Adrexo. A défaut, les postier-e-s pourront faire grève pour une juste rétribution de ce travail supplémentaire.

Le ministre de l’intérieur, chantre de la transformation de l’action publique a cependant eu une illumination lors de son audition au sénat. Il a évoqué la possibilité d’un changement législatif sur la distribution du matériel électoral qui resterait sous monopole de l’opérateur public. A l’heure ou des rapports sur l’avenir des missions de La Poste sont sur le bureau du ministre de l’économie, SUD PTT met en garde le gouvernement et lui recommande de ne pas jouer à l’apprenti sorcier avec le premier service public de proximité. Cela passe par la fin de la précarisation de l’emploi, des recrutements massifs et une réflexion sur la stratégie du groupe La Poste qui, rappelons le est un patrimoine public au service de l’intérêt général.

Une interview de Eddy Talbot par France Info :

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