Résultats du groupe La Poste : le fric comme "raison d’être".

La lecture des résultats du groupe La Poste est une occasion de faire le point sur le chemin parcouru, sur un an mais aussi sur un cycle. La Poste en connaît plusieurs, comme ceux des contrats passés avec l’Etat, les Elus locaux, les accords interbancaires autour de l’épargne administrée, des contrats d’assurance, les cycles du « business » qu’on trouve au fil des partenariats dans la téléphonie, la banque, l’express..
Au gré de ces contrats force est de constater que la « raison d’être » de La Poste perd peu à peu de son essence, celle d’être au service de l’intérêt général, pour se concentrer, se recroqueviller sur une toute autre philosophie, celle du profit.

Avec le formidable alibi de la réduction des volumes du courrier, de la concurrence sur l’industrie du colis ou de la banque, les dirigeants successifs du groupe soutenus sans réserve par les différentes tutelles qui se sont succédées depuis 20 ans ont, sans coup férir, organisé la transformation du premier service public de proximité en une société de services à l’image d’ISS, De Richebourg ou ONET.

Réorganisations incessantes, désengagement des territoires, tournées à découvert, démantèlement des boites aux lettres, sous-traitance accrue, délaissement des clientèles défavorisées, tout y est pour que La Poste monte sur le podium des multinationales. Preuve supplémentaire, il n’y a jamais d’excuses ou de remords, encore moins de volonté de réparation quand des drames surviennent du fait de sa marche forcée vers le profit. On en veut pour preuve l’appel de La Poste condamnée dans l’affaire Seydou Bagaga, travailleur dissimulé qui s’est noyé en livrant un colis en 2013. On ne compte plus les procédures pour entraver le travail des CHSCT, les éléments de langage pour éluder les raisons de suicides, de burn out, les cas de répression contre les syndicalistes lanceurs d’alerte, allant jusqu’au licenciement ou la révocation.

Tout y est avec en sus un arrière goût d’échec commercial tant ces stratégies sont boiteuses, en voici quelques exemples :

- Comment expliquer les 140 millions de perte nette de La Poste mobile depuis sa création malgré un passage de 250 000 à plus d’un million de clients ?

- Comment expliquer le désert en matière de recherche et développement, comme en témoigne l’embryonnaire activité de la branche numérique dont les résultats sont artificiellement dopés par l’agrégation de filiales ? Autre exemple récent avec une borne en BP pour établir une carte grise, c’est un prestataire externe qui l’a fait ! La Poste aurait pu être le tiers de confiance numérique des échanges comme elle l’est pour les échanges physiques, c’est ça servir l’intérêt général.

- Coté climat, comment se satisfaire du tout routier quand la vente d’Europe Airpost aura coûté plus d’1 milliard d’€ de location pour que finalement la desserte hexagonale en TGV J+1 soit calamiteusement abandonnée, avec certes une grande part de responsabilité de gouvernements incapables de traiter les sujets écologiques en y mettant les moyens.
On pourrait continuer cette litanie pendant longtemps, mais il y a les conséquences de cette stratégie fondée sur la cupidité et le dédain de la collectivité, de l’intérêt général.. exemples :
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- Un contrat de présence postale qui met à la charge des contribuables les fermetures des bureaux, les loyers des APC et RPC, une politique de chasse au cash dans les bureaux « expert » qui vise à faire évacuer vers des bureaux bien isolés les files d’attentes « irritantes » le jour des indemnités sociales. Citons la fumisterie des MSAP ou MFS, qui ressemblent à des têtes de gondole de supermarchés pour des prestataires de services publics trop heureux de fermer des infrastructures en refilant les activités à des « agents tablettes ».

- Des populations outre mer considérées comme des sous citoyens quand ils paient 30 à 60 % de plus qu’en territoire métropolitain les colis du service universel, pas très constitutionnel ça...

- Coté services financiers on persiste dans la désorganisation avec des retards de traitement considérables, des automates qui orientent les demandes ou pas suivant l’intérêt commercial qu’elles sous-tendent. C’est aussi un système d’information usine à gaz qui n’en finit pas « d’évoluer » pour finalement pousser le client à se « selfcariser », ceci pour une augmentation régulière des frais bancaires au prétexte que LBP reste parmi les moins chères..

- Le courrier qui a certainement pris la plus grosse claque depuis dix ans avec la saignée dans les emplois décrétés par des calculs fumeux que même des astreintes de décisions de justice ne peuvent obtenir, la souffrance au travail, les locaux infréquentables des ilots, etc...

Emploi, salaires, conditions de travail, service public, écologie, le constat est terrible et pour notre fédération, il n’y a aucune raison de se satisfaire de la stratégie menée depuis 20 ans. Le vernis qui lustre les accords sociaux, la « neutralité carbone » qui verdit la fumée des pots d’échappement de 72 000 véhicules (hors sous-traitants) ne suffisent pas à masquer un tableau bien sombre pour la collectivité.

Alors, à l’heure d’une réflexion sur la raison d’être de La Poste, à l’heure des comptes 2019 et à l’orée d’une fusion avec une soit disant corne d’abondance assurancielle, nous portons une motion de défiance sur l’intégralité de votre travail.L

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