Procès France Télécom : une grande victoire pour le monde du travail.

La condamnation de France Télécom et de ses sept ancien·ne·s dirigeant·e·s nous soulage et, dès ce jour du 20 décembre 2019, beaucoup de victimes pourront voir autrement leur avenir.

Ce procès est une réussite pour la fédération SUD !

Il récompense des années de lutte, où nos militant-es étaient souvent isolé-es, souvent brutalisé-es, souvent montré-es du doigts, souvent sanctionné-es, souvent jeté-es à la rue, souvent abandonné-es aux traitements médicaux et aux mises en retraite d’office, souvent disparu-es dans les oubliettes des plans de restructuration et d’injonction au départ.

Nous étions face à un interdit majeur, car le plan mis en oeuvre dans l’entreprise pour assurer son passage dans le monde cynique du capitalisme financier, est une déni majeur de ce qui fonde selon nous une entreprise : les salarié-es contribuent à sa réussite, ils sont le coeur et le sang et souvent les larmes de cette communauté sociale. La réduction de cette communauté aux simples produits financiers des dividendes a conduit ces dirigeants à des comportements criminels.

Nous attendions un jugement exemplaire. Les amendes sont maximum pour l’entreprise et ses trois dirigeants et des peines de prisons fermes sont prononcées. Nous saluons le travail des juges car ce qui s’est passé à France Télécom est un crime social qui ne doit plus jamais se reproduire.
C’est un message clair qui va sans doute assombrir le ciel des prédateurs financiers et jeter un voile d’infamie sur cette ancienne direction de France Télécom. Mais il faut encore se rendre à l’évidence, ce que nous avons connu à France Télécom existe dans d’autres grandes entreprises, soumises à la financiarisation, avec un mépris grandissant des salarié-es considérés comme simple variables d’ajustement.

Ce procès ouvre donc des questions plutôt qu’il ne les ferme.

Non pas pour le sens du jugement, mais tout d’abord pour les victimes : peuvent-elle reprendre goût à l’avenir alors qu’elles ont vécu des années de plomb et que les peines sont ressenties si légères ?
Non pas pour le passé, mais pour l’avenir, car même l’avenir d’Orange est incertain : Mercredi 4 décembre, suite à un entretien avec un membre de la hiérarchie, une jeune Chargée d’Affaires d’une unité technique d’Orange est montée au 3ème étage d’un bâtiment à Tours et a enjambé la fenêtre. Ce sont des collègues qui sont intervenus pour l’empêcher de passer à l’acte.
Le monde du travail va décidément bien mal et les méthodes de management qui y règne actuellement sont cruelles et criminelles, elles doivent être condamnées avec la plus extrême fermeté. A ce titre, nous demandons que les prévenu-es encore en activité dans le groupe, bien qu’ils-elles aient fait appel, n’exercent plus aucune fonction directoriale.
Comme nous souhaitons que ce procès historique de France Télécom fasse date et qu’il ait une suite, nous avons oeuvré à la rédaction d’un texte public qui interpelle les parlementaires pour que la loi évolue et que de nouveaux droits démocratiques soient créés pour la santé au travail et l’environnement.
Par ailleurs, nous nous réjouissons de l’initiative de la sénatrice Sophie Taillé-Poillan qui organise le 20 janvier au Sénat, un colloque sur les suites du procès et sur la situation actuelle dans les entreprises publiques ou privées après les ordonnances Macron.
Car, le procès de France Télécom n’aurait pas pu avoir lieu sans notre acharnement, mais aussi sans l’existence des CE, des CHSCT et des délégués du personnel qui ont permis la résistance des salarié-es et la constitution de dossiers à destination de la justice. Après les ordonnances Macron, la mise à mal de ces instances et l’affaiblissement des représentant-es des salarié-es, un tel procès ne pourrait sans doute plus avoir lieu.

Une victoire collective

La fédération SUD rend hommage à tous les militant-es, aux élu-es, à nos avocats, aux fonctionnaires de la justice, de la police, de l’inspection du travail, aux médecins, aux chercheur- es qui nous ont soutenus par leurs témoignages et qui nous ont aidés dans le développement de l’Observatoire du stress et des mobilités forcées à France Télécom.
Que toutes ces personnes, connues ou moins connues, soient remerciées, car sans elles, nous n’aurions sans doute pas gagner contre l’ « Empire du mal » qui a mis un genou à terre : la force était avec nous !
Et nous espérons par ailleurs qu’elle restera avec nous dans cette période où ce monde du travail redresse la tête dans sa lutte pour le maintien d’une solidarité entre les générations : nous ne battrons pas en retraite, nous devons avoir confiance dans notre victoire !

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