De l’algorithme à la souffrance organisée

La diffusion du reportage d’Envoyé Spécial hier soir sur France 2 est implacable pour les dirigeants du groupe La Poste. Après avoir dénigré en interne un journaliste de l’émission et s’être murée dans le silence, la direction de La Poste voit sa politique mortifère étalée au grand jour. Après d’autres enquêtes, notamment le dossier de Libération publié dans le contexte de la grève des postier·e·s du 92, c’est un nouveau coup sur les méthodes de management, institutionnalisées en directives permanentes au sein du groupe.

Depuis plus de 10 ans, la fédération Sud PTT dénonce la souffrance généralisée et le système mis en place pour étouffer les suicides liés aux réorganisations incessantes et à l’augmentation de la charge de travail. Hier soir, ce sont des cadres dirigeants, des communicants qui ont témoigné du scandale en cours depuis des années. La Poste cache les dizaines de victimes de sa politique, et tente par tout les moyens de faire bonne figure en parcourant les colloques sur le "management bienveillant". Le reportage de ce soir nécessite non pas un nouveau rapport Kaspar qui servira a mettre la poussière sous le tapis, mais des mesures d’urgences concrètes. En premier lieu, nous exigeons un moratoire sur l’ensemble des réorganisations. Le président Wahl doit s’expliquer, y compris devant la représentation nationale. Lui et ses prédécesseurs sont responsables.

De réorganisations en réorganisations, les conditions de travail des postier·e·s se dégradent, des dizaines de milliers d’emplois disparaissent. Sous prétexte de baisse des flux, les centres de tri ferment et les facteurs ont des tournées de plus en plus longues. Le logiciel Georoute qui calcule les tournées sans connexion avec le réel est encore utilisé, alors que le groupe, malgré les injonctions juridiques, est incapable de présenter les fondements de cet outil. Le tout numérique optimise sans doute les suppressions d’emplois mais il est surtout une boite noire qui permet à l’entreprise de faire ce qu’elle veut sans rendre de compte. En raison d’une "perte des données lors d’un déménagement" ayant servi à créer l’algorithme, la direction continue a raconter n’importe quoi et de se moquer des postiers. Il est temps que cela cesse.

En juillet, suite aux articles dans Libération, la direction du groupe et ses affidés avaient communiqué en osant dire que notre fédération tenait la plume des journalistes. Osera-t-elle encore le faire, à propos d’Envoyé Spécial ?

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